Sans défiance et sans croyance, donner un sens nouveau à
ce qui nous arrive
La pandémie actuelle soulève de nombreuses interrogations. Certaines sont liées à son origine : animale, humaine, fortuite, voulue ? D’autres sont relatives à la gestion de la crise et de ses effets. Ces doutes ou incompréhensions entraînent la défiance ou, inversement, la croyance. Qu’elles dénoncent un mouvement complotiste ou annoncent l’effondrement, ces réponses ne sont que des moyens pour trouver un sens à ce qui nous arrive. Un sens dont l’esprit humain a besoin pour modérer les effets traumatiques d’une situation qu’il subit et le dépasse.
Mais n’y a-t-il pas une autre façon de donner sens à ce bouleversement ? Sans chercher des coupables et sans prôner le catastrophisme ou l’illusion, il est possible d’apporter une analyse différente, une voie de raison et d’avenir.
Au cours du XXe siècle, l’accélération des progrès scientifiques a permis des avancées technologiques qui ont modifié nos rapports aux temps et à l’espace. Progressivement, l’être humain a dépassé les limites inhérentes à sa condition. Maîtrisant le monde en fonction de ses seuls besoins, son sentiment de maîtrise et de puissance se voyait quotidiennement conforté. En parallèle, l’application des connaissances a eu d’autres effets : multiplication des biens, des transports, des moyens de communication, des informations etc. On en mesure aujourd’hui les effets : les désastres écologiques sont considérables.
Face aux constats de cette dérive quantitative qui vénère la vitesse et le temps court, de plus en plus de détracteurs posent la question de son bien-fondé. Notre mode de fonctionnement doit être revu. Ainsi, la démultiplication quantitative doit être limitée : décroissance, sobriété heureuse, valeur du bien-être plus que des biens, limitation des transports et des informations etc. L’homme doit cesser sa dispersion planétaire et retrouver son environnement proche pour mieux le respecter.
En ce sens, le covid-19 réussit mieux que tous les prédicateurs et penseurs réunis. Il impose une réalité de fait à laquelle aucun individu ne peut se soustraire : celle de l’arrêt brutal d’un développement effréné basé sur la quantité et la vitesse. Si ce modèle de développement doit avoir une fin, peut-il avoir un sens et par quoi le remplacer ?
Considérons à nouveau que tous les progrès matériels réalisés l’ont été grâce à l’application de sciences utilisant les nombres. Dans chacune d’elles, le nombre a une valeur quantitative. Il est donc fort logique que le processus des connaissances ait abouti à l’accumulation quantitative dans de nombreux domaines.
Or, ce que demande la régulation des excès liés au quantitatif, c’est la valorisation du qualitatif : consommer moins, goûter le temps long, sélectionner les informations etc. A ce niveau, le covid-19 nous imposerait une transformation impensable jusque là ?
Cette émergence du qualitatif se limite-t-elle à notre quotidien ou à un simple choix socio-politique ?
Si nous appliquons ce principe de l’émergence du qualitatif, est-il possible de le transposer dans d’autres domaines notamment celui des sciences puisque ces dernières influent largement sur notre modèle de développement ? Peut-on poser un principe différent qui, à la fois, sauvegarde les acquis du passé et apporte au présent un sens complétement nouveau ?
Et si le nombre n’était pas fondamentalement quantitatif mais qualitatif ? Ce qui signifie qu’il ne représenterait plus une quantité mais serait couplé à une information caractéristique, base de sa valeur qualitative.
Ainsi, 2 ne serait plus 1+1 mais 2 serait en lien avec une information dont l’effet peut être ressenti. Et tout serait sensible à ce principe, de l’infiniment grand à l’infiniment petit car c’est sur ce principe que reposeraient le mouvement et l’organisation de la Nature, du monde et de l’univers. Ce serait donc lui qui déterminerait les relations de chaque être à son environnement, ses facultés d’adaptation et d’évolution puisque cette information a la faculté d’être mémorisée. Cette Mémoire Fondamentale serait non seulement mathématique et qualitative, elle serait dynamique, relationnelle et transmissible de manière totalement logique.
C’est pourquoi son ignorance désorganiserait non seulement le vivant, elle arrêterait le mouvement de la vie humaine en empêchant la mise en oeuvre de ses bases relationnelles. Le covid-19 nous renverrait donc des effets que nous avons créés ? Il nous renverrait ainsi à des questions majeures. Quelle est notre responsabilité ? Quelle est notre place, la valeur de notre volonté ? Comment agir désormais et selon quels principes ? Une étape difficile certes mais nécessaire si l’on considère que le quantitatif doit être désormais limité pour être équilibré par le qualitatif. Comme nous devons avoir conscience, en toute humilité, que des limites structurelles forment le socle de notre dimension matérielle. Elles ne sont pas contraignantes, elles sont inéluctables et nous garantissent du chaos.
Cette intégration du qualitatif et cette conscience nouvelle peuvent donc être la base d’un sens et d’un monde nouveaux.
Mais encore va-t-il falloir les accepter. Comme à chaque changement majeur, les phénomènes de résistance vont être nombreux. De cela aussi, il ne va pas falloir avoir peur.